Enfin, des semaines, peut-être quelques mois après la lecture je reprends les passages notés au crayon de bois dans le petit Essai sur le Lieu Tranquille, de Peter Handke. Handke + lieu a tout de suite eu un effet magnétique sur moi, dans la librairie de Tours. Essai sur le cabinet de lectures, les cabinets de lecture … pour certains. Lieu par essence solitaire, ce Lieu Tranquille interroge aussi la définition du mot lieu.
Il suffisait parfois, pour que viennent ces instants de protection et de repli, de baisser les yeux vers le sol, vers les rails des tramways où les feuilles se mêlaient au sable. Naissait alors un lieu tranquille […]
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Il était singulier aussi que la simple idée d’un des lieux tranquilles de mon enfance villageoise suffît à remplacer le lieu lui-même, et que le souvenir de celui-ci, de le reculer ainsi dans l’espace et le temps, le fît apparaître avec incomparablement plus de force que cela n’avait été le cas là-bas autrefois.
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Le Lieu Tranquille de Nara fut aussi celui d’une libération. Ce n’était pas un simple refuge, un asile, un retrait. C’était, en cette heure matinale, un lieu comme jamais, comme aucun autre peut-être, le lieu « lieu ». Je me sentais […] exalté en lui, rempli d’une énergie vivifiante et indéterminée. Le lieu m’enthousiasmait. Oui, un « esprit » était à l’oeuvre dans ce lieu tranquille, qui, pour reprendre Tanizaki, assurait le « repos », et en même temps vous remettait d’aplomb, le pied à l’étrier […].
Peter HANDKE, Essai sur le Lieu Tranquille