Parce qu’il fallait bien, Christian Garcin le voyageur, je suis ses voyages sur Facebook, et peut-être que ce sont eux que je retrouve là, quelques années plus tard. Une entrée dans cette œuvre par les vétilles, puis par ce livre sur les pas de Cendrars dans le transsibérien. Avec l’envie d’aller voir du côté des romans, maintenant. Voyageur (donc géo-graphe ?), il nous évoque sa relation aux lieux, l’importance de la projection dans les noms, l’espace.

Incroyable immensité d’Athènes. Depuis le mur de « Thémistocle », les immeubles se succèdent le long du littoral, à l’infini. Il ne s’agit sans doute plus d’Athènes mais du Pirée, ou d’une autre localité encore, mais ce que l’œil et tous les sens perçoivent, c’est une seule ville.

Vetilles

Toute ma vie je cours , je courrai après cet état-là de la perception du temps et de l’espace. J’avale des kilomètres, parcours des étendues immenses et lointaines, et ce que je cherche réside dans le regard imaginé d’un enfant sur trois mètres carrés d’un territoire qu’il a fait sien, et qui recouvre le monde.

Vétilles

C’est d’ailleurs à une arrivée similaire à Minsk, en hiver également, dix mois plus tôt, que je songeai tout d’abord, selon ce principe ancien et un peu agaçant chez moi qui est le « démon de l’analogie », comme si chaque lieu traversé, chaque expérience vécue, chaque livre lu m’en évoquait systématiquement, et toujours en premier lieu, un autre.

Le Lausanne-Moscou-Pékin

Ce transsibérien dans lequel nous venons de monter, l’idée même de traverser la Sibérie, font probablement davantage rêver les francophones que les Russes, ceci grâce sans doute à Michel Strogoff et à Blaise Cendrars – pour évoquer là deux personnages diversement fictifs. Pour les Russes qui grimpent dans ce train, il s’agit d’un moyen de transport, lent et coûteux. Pour nous, d’un voyage dans les noms et l’imaginaire, dans l’histoire et la géographie, dans le broun-roun-roun des roues comme disait Blaise Cendrars, dans le rythme à quatre temps des trains d’Europe, à cinq ou sept temps des trains d’Asie, dans la littérature aussi, et la vive réalité dans quoi baignent les hommes et les lieux que nous traversons – ou plus exactement les lieux qui nous traverseront, condition sous laquelle un des buts de ce voyage, à savoir faire coïncider toutes ces réalités, imaginaires et onomastiques, historiques et géographiques, sonores, littéraires et quotidiennes, sera partiellement atteint.

Le Lausanne-Moscou-Pékin

Cendrars le savait, qui alignait ses litanies de villes, Tomsk Tcheliabinsk Kaïnsk Obi Taïchet Verkhné-Oudinsk… : on voyage dans les noms avant de voyager dans les lieux, et il n’est pas rare que le premier de ces voyages conditionne le second. Les noms par exemple d’Oulan Bator, Valparaiso, Samarkand, Vladivostock, Montevideo, Irkousk aussi, bien sûr, sont comme des diamants qui brillent de mille feux et qu’on observe à travers une vitre sans imaginer pouvoir les posséder un jour, c’est-à-dire s’y rendre. Lorsqu’on le fait, le décalage est parfois colossal entre la brute réalité du lieu et l’imaginaire dont on l’avait habillé.

Le Lausanne-Moscou-Pékin

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