On n’est pas le même partout. L’équilibre entre 2 villes ; deux pôles ; et ce qui les relie : un fil de la vierge léger léger : le trajet en train. Il y a longtemps que cette vieille édition rose de 1994 (achetée sur conseil : « tu aimes le train, c’est un roman à lire dans le train, d’autant que tu prends souvent cette ligne » (fut un temps avec arrêt à Firenze, ville non mentionnée il me semble dans le roman)) passe d’étagère en étagère. Donc près de 20 ans après – laissé mûrir le livre, commencé une fois à l’époque, prêté plusieurs fois depuis – la litanie des gares, l’aller pour Rome.
car s’il est maintenant certain que vous n’aimez véritablement Cécile que dans la mesure où elle est pour vous le visage de Rome, sa voix et son invitation, que vous ne l’aimez pas sans Rome et en dehors de Rome, que vous ne l’aimez qu’à cause de Rome, parce qu’elle y a été, dans une grande mesure, qu’elle y est toujours votre introductrice, la porte de Rome, comme on dit de Marie dans les litanies catholiques qu’elle est la porte du ciel, ce qu’il faudrait absolument que vous sachiez, c’est pour quelles raisons Rome possède sur vous un tel prestige, et aussi comment il se fait que ce prestige ne possède pas suffisamment de solidité objective pour que Cécile puisse s’en faire consciemment, volontairement, l’ambassadrice à Paris, comment il se fait qu’Henriette, malgré tout ce que la Ville des Villes représente nécessairement pour elle, avec son catholicisme, ait pu considérer l’attachement que vous lui portez comme l’expression même de ce qu’elle vous reproche,
PARIS
15 place du Panthéon
Or ce n’est point la faute de Cécile si la lumière romaine qu’elle réfléchit et concentre s’éteint dès qu’elle se trouve à Paris; c’est la faute du mythe romain lui-même qui, dès que vous vous efforcez de l’incarner d’une façon décisive, si timide qu’elle demeure malgré tout, révèle ses ambiguïtés et vous condamne. Vous équilibriez votre insatisfaction parisienne par une croyance secrète à un retour à pax romana, à une organisation impériale du monde autour d’une ville capitale qui ne serait peut-être plus Rome mais par exemple Paris. Toutes vos lâchetés, vous leur trouviez une justification dans l’espoir où vous étiez que pourraient se fondre ces deux thèmes.
Une autre femme que Cécile aurait elle aussi perdu ses pouvoirs; une autre ville que Paris les lui aurait aussi fait perdre.
ROME
56 via Monte della Farina
Vous dites : il faudrait montrer dans ce livre le rôle que peut jouer Rome dans la vie d’un homme à Paris; on pourrait imaginer ces deux villes superposées l’une à l’autre, l’une souterraine par rapport à l’autre, avec des trappes de communication que certains seulement connaîtraient sans qu’aucun sans doute parvînt à les connaître toutes, de telle sorte que pour aller d’un lieu à un autre il pourrait y avoir certains raccourcis ou détours inattendus, de telle sorte que la distance d’un point à un autre, le trajet d’un point à un autre, serait modifié selon la connaissance, la familiarité que l’on aurait de cette autre ville, de telle sorte que toute localisation serait double, l’espace romain déformant plus ou moins pour chacun l’espace parisien, autorisant rencontres ou induisant en pièges.
Donc
Le mieux, sans doute, serait de conserver à ces deux villes leurs relations géographiques réelles
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NB : c’est au bas de la page 241 que : impossible de ne pas tenter de lui expliquer pour quelles raisons s’est produite cette modification,
25 avril 2013 at 8:40
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Ajoutez votre grain de sel personnel… (facultatif)